Dans plusieurs communes du Sud, la gestion des terres est souvent source de litiges. Au sein de plusieurs communautés, les femmes et les jeunes sont souvent confrontés à l'accès aux terres agricoles. Aussi, si des activités agricoles sont déroulées, les risques de conflits entre agriculteurs et éleveurs sont énormes, avec la divagation des animaux. La problématique du foncier et la divagation des animaux, quelles démarches pour une gestion concertée et sans heurts ?
Au niveau du département de Bignona, dans le Nord-Sindian, la situation est quelque peu complexe. Cette zone a subi lourdement les effets du conflit casamançais pendant quatre décennies, provoquant la fuite des populations et l’abandon des terroirs. Le retour des populations, suite à l’accalmie et au climat de paix ambiant, entraine une ruée vers les terres. Bassirou Djiba, habitant de Bridiago, village de Djibidione, rencontré avant ces concertations, révèle que « l’accalmie a facilité le retour de beaucoup de populations. Ces personnes ont été frappées par la peur des combats et ont fui pour la plupart vers la Gambie ».
Avec cette longue accalmie, les gens sont à l’aise pour revenir et s’installer, a-t-il ajouté. Avant de souhaiter que la paix s’installe définitivement et que les populations puissent vaquer à leurs occupations dans cette localité qui a tant souffert du conflit. « Nous ne manquons pas de terres cultivables ici dans le Djibidione. Malheureusement, la crise a affecté nos activités longuement et durablement », se désole Bassirou Djiba. La crise a favorisé l’abandon de plusieurs périmètres agricoles, ce qui a impacté les activités agricoles.
À côté, l’accès des femmes et des jeunes à la terre constitue aussi un frein au développement de l’agriculture dans cette zone, comme partout ailleurs. Il y a aussi le fait que la divagation des animaux a découragé beaucoup de promoteurs agricoles à continuer d’investir dans ce secteur, apprend-on des autorités locales et certains acteurs au développement.
Face à ces problèmes à multiples équations, les concertations sur la gestion concertée du foncier et la divagation des animaux sont perçues comme des solutions pour éviter d’autres crises ans les communautés de Djibidione, voire dans le département de Bignona.
De leur côté, des femmes actrices du développement membres des fédérations du Comité des femmes pour la paix en Casamance s'activent dans la prévention pour une gestion concertée du foncier au niveau de certaines localités où le problème est crucial, de même pour la divagation des animaux.
Djibidione, des propriétaires prêts à céder des terres aux promoteurs
À Djibidione, des concertations communautaires sur le foncier et la préparation de la campagne agricole, et le phénomène de la divagation des animaux ont réuni l’essentiel des acteurs concernés durant des jours. Les débats ont permis de trouver des consensus pour une gestion concertée du foncier. La remarque est que beaucoup de terres cultivables sont disponibles. Seulement, elles sont la propriété des hommes. Les jeunes et les femmes ont du mal à accéder à la terre, ce qui constitue un frein au développement de la localité.
D’après l’un des chargés de projet au niveau du Comité régional de solidarité des femmes pour la paix en Casamance USOFORAL, Ousmane Bodian, « les propriétaires sont d’accord pour céder la terre aux promoteurs pour le développement de la commune de Djibidione ».
En ce qui concerne l’accès des femmes à la terre, la volonté populaire ou communautaire tend à l’unanimité vers le droit à la femme de détenir la terre, a annoncé le chargé de projet à USOFORAL faisant l’économie des conclusions. Dans certains villages, cette décision commence à s’appliquer et à faire effet, selon les témoignages des acteurs et des chefs de village qui ont pris part aux concertations. Cet engagement a été adopté après de longs débats et des plaidoyers de plusieurs acteurs, dont des femmes, sur la nécessité d’octroyer des terres aux femmes, surtout si ces terres sont inexploitées.
Cependant, la 3e adjointe au maire de Djibidione, Lissa Diédhiou, a souhaité la mise en application de cette résolution au niveau de l’espace communal. Pour elle, la solution au problème foncier réside dans le fait qu’il faut que les individus arrêtent surtout d’accaparer les terres. « Chaque personne doit arrêter de dire être détentrice d’un tel domaine ou espace terrien et n’exploite pas surtout cette terre ». Elle suggère que les personnes détentrices de terres non exploitées cèdent ou attribuent des parcelles à des individus ou à leurs voisins qui ont envie et qui sont déterminées à travailler la terre, surtout aux femmes. Elle conseille aux populations de se rapprocher des services de la municipalité pour la déclaration de leurs terres, et de ce fait des délibérations vont être décernées à chaque propriétaire pour éviter d’éventuels problèmes. La détention légale de la terre nécessite une délibération avec un papier légal, a recommandé Mme Diédhiou. Beaucoup se disent propriétaires terriens sans aucun papier. Ce qui peut être source de conflit.
La divagation des animaux, un frein aux activités agricoles
« La divagation des animaux a fait que beaucoup de personnes ne peuvent plus travailler la terre aujourd’hui », selon Lissa Diédhiou. D'après la 3e adjointe au maire de Djibidione, des éleveurs laissent souvent leur bétail pénétrer dans les champs où les bêtes dévorent et détruisent tout sur leur passage.
Ainsi, les chefs de village sont déterminés à jouer les bons offices entre éleveurs et agriculteurs. D’après l’adjointe au maire, ces chefs de village sont habilités à prendre des décisions qui vont dans le sens de la bonne marche de la communauté, afin que chaque habitant y trouve son compte.
Aussi, chaque village à la latitude de définir son plan d’action et de mettre en place une réglementation spécifique à sa zone par rapport au parcours du bétail. Ce qui pourrait restaurer le climat de confiance entre éleveurs et cultivateurs.
Cette concertation à Djibidione sur le foncier et la divagation des animaux en pleine campagne agricole a été précédée d'une rencontre pareille
À Djignaky aussi, des concertations ont été déroulées, d'après Marianne Patricia Mandian Lopy, chargée de projet au Comité régional de solidarité des femmes pour la paix en Casamance. Les populations ont eu à bénéficier d’une meilleure connaissance des réalités du foncier. Et pour Mme Lopy, ces concertations doivent pouvoir se tenir au niveau de toutes les zones d’intervention du Comité régional de solidarité des femmes pour la paix en Casamance, pour espérer progressivement mettre fin à ces problèmes.
Pour la mise en œuvre des décisions issues de ces concertations, la 3e adjointe au maire, Lissa Diédhiou, assure la disponibilité de l’équipe municipale à accompagner les agriculteurs et les éleveurs. Elle a invité les familles à donner des terres aux jeunes afin qu'ils puissent être accompagnés par la municipalité de Djibidione à avoir des papiers légaux et jouir pleinement de ces espaces agricoles.
Djibidione, Djignaky, Oulampane dans le département de Bignona et Boutoupa Camaracounda dans le département de Ziguinchor, ces concertations communautaires sont lancées pour élaborer des feuilles de route pour la gestion du foncier et la divagation des animaux. L’espoir est permis, avec ces concertations, pour une gestion concertée du foncier et la divagation des animaux.
Ainsi, la recherche de solutions durables à ces phénomènes dans la région méridionale du pays peut être un grand pas dans la recherche de la paix tant souhaitée en Casamance.
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